Morgane Dasaz, d’assistante de direction à céramiste : « Finalement, ce licenciement aura été un soulagement »
« J’ai commencé par une fac d’art, mais j’ai bifurqué vers une licence gestion des organisations et des entreprises, avant de travailler dans plusieurs grosses structures. La dernière avant mon licenciement, c’était une entreprise de nautisme où j’étais assistante de direction. La société a subi une liquidation judiciaire en 2022 et j’ai été licenciée, mais j’ai eu la possibilité de me lancer dans une reconversion grâce à France Travail. J’ai commencé par une session de découverte de la céramique. Cela a été un déclic. J’ai donc directement enchaîné par une formation de six mois dans une école à Montpellier, à partir de février 2023, avant de faire un stage de formation auprès d’un artisan céramiste à Béziers via la plateforme Passpassion. Et j’ai pu conserver une partie de mes revenus pendant mes formations, grâce aux accompagnements pour la reconversion. J’ai alors investi dans du matériel et commencé à travailler à mon compte dans mon cabanon de jardin en 2024, à faire des marchés.
Depuis, j’ai déménagé en Corrèze et j’occupe un local municipal depuis mai 2025. Grâce à des subventions de l’agglomération, j’ai pu investir dans un four. Et je consolide petit à petit mon projet de céramiste en auto-entrepreneure et en donnant des cours en parallèle, tout en participant à La Halle Chamboulivoise, un lieu qui réunit des artisans et des commerçants locaux. Cela me permet de me faire connaître, de faire des ateliers de découverte. Finalement, ce licenciement a été un soulagement pour moi, un déclencheur. J’étais un peu entre deux eaux depuis un moment, je voulais changer de métier mais la possibilité ne se présentait pas. Bien sûr, j’ai eu un peu peur, parce que se reconvertir dans un métier manuel et à son compte n’est pas sans risque, notamment vis-à-vis du salaire. Aujourd’hui, j’ai 32 ans, je mène des projets qui me tiennent à cœur, je m’investis plus dans mon métier, je me gère seule et ça me plaît. »
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Laurent Menet, de responsable technique à réparateur en électroménager: « Le licenciement après 37 ans dans l’entreprise a été un choc »
« J’ai 60 ans. J’ai commencé mon parcours en 1985 par une formation en électronique après l’armée et j’ai travaillé dans les chariots élévateurs, avant de passer 37 ans dans une société d’ascenseurs comme responsable technique. En 2023, quand on m’a annoncé mon licenciement pour me mettre dehors du jour au lendemain, c’était une grande surprise, un choc. Je viens de passer en appel et le licenciement a été jugé comme non fondé et non autorisé, mais des procédures sont encore en cours et je ne souhaitais pas être réembauché dans cette même entreprise.
Avant le licenciement en avril 2023, j’étais déjà en quasi burn-out et surmenage professionnel, et après l’annonce, je suis carrément parti en dépression. J’ai été bien suivi pour m’en relever, et j’ai pu me reposer, me détendre, me vider la tête. Comme je devais encore travailler quelques années avant de toucher ma retraite et que je ne pouvais pas rester au chômage, j’ai commencé à chercher un nouveau job. J’ai eu toujours les mêmes réponses de la part des sociétés que j’ai contactées dans mon secteur d’activité : mes compétences correspondent, ma candidature est intéressante, mais on ne donne pas suite. Je pense que la barrière de l’âge jouait beaucoup et c’était très décevant.
Ma réflexion a alors été de m’ouvrir à d’autres perspectives, j’ai même pensé à me lancer comme auto-entrepreneur. Je suis alors tombé sur une annonce de formation en électroménager. Je suis bricoleur donc je me suis dit pourquoi pas. Je suis donc rentré dans l’Académie Murphy en septembre 2023 pour suivre une formation de six mois financée par France Travail. L’entreprise forme dans ses académies, puis embauche, j’ai donc pu enchaîner directement par un CDI de technicien de réparation et reconditionnement en gros électroménager. Je travaille depuis en atelier, j’ai été très bien accueilli et formé sans que l’âge soit un critère. Je dois être en retraite en janvier 2028, et je suis en train de discuter avec l’entreprise pour bénéficier de la retraite progressive et peut-être passer à un mi-temps petit à petit. »
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Angélique, de la grande distribution à l’ébénisterie: « J’étais en arrêt pour burn-out quand le licenciement a été annoncé »
« Ma reconversion a été initiée plus par mon burn-out que par mon licenciement. Concrètement, j’avais besoin de me sauver de mon précédent emploi. J’ai travaillé plus de 20 ans dans la grande distribution. J’ai commencé dans le groupe Casino en tant que crémière au rayon frais, avant de passer manager épicerie en 2010. En 2022, j’ai fait un burn-out à cause des conditions et du rythme de travail qui ne faisaient qu’empirer, et j’ai eu un long arrêt de travail. La coupe était pleine, je ne pouvais plus assumer et accepter tout cela. Mon idée directrice était alors de faire autre chose, quelque chose qui ne m’abîme pas, où je me sente bien, qui m’épanouisse. Mais je manquais de passion, je n’avais pas la bosse pour tel ou tel secteur. J’ai donc fait deux bilans de compétences pour y voir plus clair.
Dans mes premiers constats, j’ai compris que je suis quelqu’un de débrouillard, qui bricole, qui aime faire. J’ai touché à tout, à la maçonnerie, à la plomberie, à l’électricité. Et l’ébénisterie est arrivée à la fin. J’ai tout de suite aimé ce contact et ce rapport au bois. Mais au départ, je n’étais pas convaincue. Mon précédent métier m’avait abîmée et j’avais très peur de reprendre un métier physique. C’est ma meilleure amie qui m’a remis les idées en place : elle avait aussi quitté Casino pour se reconvertir dans la formation pour adultes, et à l’entendre en parler, je me suis dit que je voulais la même chose. Je devais suivre ce pour quoi je suis faite. Donc je me suis autorisée à aller vers l’artisanat à 51 ans. J’étais en arrêt pour burn-out quand le licenciement a été annoncé, avec un plan de reclassement. J’ai saisi l’opportunité sans hésiter pour financer une formation. J’ai intégré l’ École d’ébénisterie d’Avignon (ESEA) en septembre de cette année, pour une formation de 10 mois. Je suis à ma place et je me projette déjà vers ma vie d’ébéniste, que ce soit comme salariée ou artisane indépendante. »