L’un des arguments des porteurs de la réforme des retraites, qui relève progressivement l’âge de départ de 62 à 64 ans, était la perspective d’accroître mécaniquement le taux d’emploi des seniors. L’étude « Quel accès à l’emploi durable pour les allocataires seniors », réalisée par l’Unédic confirme aujourd’hui que la tendance ne s’est pas inversée, et que les seniors connaissent toujours les mêmes difficultés. Pour réaliser cette enquête, l’organisme gestionnaire de l’assurance-chômage a observé les profils des 350 000 personnes de 50 à 65 ans ayant fait valoir leur droit à l’indemnisation en 2022, à la suite de la perte involontaire de leur emploi.
L’analyse de ces parcours met en évidence un « âge pivot » autour de 56 ans, à partir duquel le taux d’accès à l’emploi durable devient significativement plus faible qu’à 50 ans. Autrement dit, les faits montrent bien qu’il est plus difficile de retrouver un travail à partir de 56 ans, notamment du fait des discriminations liées à l’âge. À noter que cette chute de l’accès et du retour à l’emploi touche également les bénéficiaires du CSP, le contrat de sécurisation professionnelle à destination de licenciés économiques qui fait bénéficier d’un suivi personnalisé et intensif. Au global, 40 % des seniors au chômage y sont depuis plus d’un an, et la part des seniors en emploi chute de 84 % à 50 ans à 72 % à 59 ans.
Des disparités selon les profils de seniors
Dans le détail, dans les douze mois suivant leur inscription auprès de France Travail, seuls 28 % des demandeurs d’emploi de 50 à 65 ans ont retrouvé un emploi durable (CDI ou CDD de plus de six mois). Mais l’étude met en lumière des disparités liées au parcours avant la perte d’emploi. Et classe les allocataires seniors en plusieurs groupes distincts :
- « CDI » (37 % des allocataires des allocataires seniors: profils plus diplômés et aux allocations journalières plus élevées)
- « CDD » (25 % des allocataires : profils aux allocations plus faibles qui occupaient pour la plupart un CDD non durable)
- « intérim » (10 % des allocataires : profils ayant eu des contrats très courts, principalement dans l’industrie, la construction et le transport-logistique)
- « santé » (18 % des allocataires : profils s’étant retrouvés au chômage pour des raisons de santé ou inaptitude physique)
- « particulier employeur » (9 % des allocataires : profils qui travaillaient à domicile pour des particuliers-employeurs, plus âgés).
Ainsi, celles et ceux s’étant retrouvés au chômage pour des raisons de santé sont 16 % à avoir retrouvé un emploi durable après douze mois, soit le taux le plus faible, contre 35 % chez les seniors du groupe « CDD », qui occupaient un CDD non durable ou avaient des allocations journalières plus faibles que l’ensemble des seniors. Aussi, entre 50 et 61 ans, le taux d’accès à l’emploi durable est divisé par 3 pour les groupes « CDI » et « santé ».
Aussi, si la situation devient donc critique à partir de 56 ans, elle l’est d’autant plus au fur et à mesure que les demandeurs d’emploi approchent et dépassent la soixantaine. De fait, le taux d’accès à l’emploi durable passe de 28 % à 14 % entre 50 et 61 ans pour les personnes qui étaient en intérim, et de 26 % à 9 % pour le groupe « santé ». Dernier enseignement de l’étude, l’Unédic distingue les principaux freins à l’accès à l’emploi durable pour les seniors. On retrouve ainsi sans grande surprise les discriminations liées à l’âge, la proximité de la retraite et la santé dégradée, mais aussi les préférences d’emploi (à temps partiel, proche du domicile…), et le moindre accès à la formation.